BERLIN (PEINTRE DE)

BERLIN (PEINTRE DE)
BERLIN (PEINTRE DE)

BERLIN PEINTRE DE (env. \BERLIN (PEINTRE DE) 510-\BERLIN (PEINTRE DE) 460)

On désigne sous le nom de Peintre de Berlin, qui est en fait l’abréviation de la dénomination plus complète «Peintre de l’amphore de Berlin (Staatliches Museum) 2160» — une de ses œuvres les plus belles —, un artiste athénien anonyme appartenant à la deuxième génération des peintres de vases qui utilisent comme moyen d’expression privilégiée la technique de la (ou des) figure(s) rouge(s). Bien qu’il ait été des plus prolifiques (on lui attribue à ce jour près de trois cents vases), le Peintre de Berlin n’a signé aucune de ses œuvres; il doit son nom de convention, comme d’ailleurs la plupart des peintres de vases attiques, au savant britannique J. D. Beazley dont la monographie fait encore autorité: Der Berliner Maler (Berlin, 1930), republiée dans sa version originale anglaise, The Berlin Painter (Mayence, 1974). Le Peintre de Berlin avait une très nette prédilection pour les récipients de taille grande ou moyenne: amphores (depuis les grandes amphores à col jusqu’aux petites amphores dites de Nola — d’après le nom du site italien où l’on en trouva un grand nombre —, en passant par les amphores panathénaïques, à panse très renflée et à col très étroit), pélikès (variété d’amphores dont la panse proéminente a son diamètre maximal vers le bas), loutrophores (sorte d’amphores très allongées), cratères (en calice, en cloche, à volutes et à colonnettes), dinos (cuves à fond arrondi), hydries, stamnos (forme qui s’apparente à la fois à l’amphore et à l’hydrie, avec deux anses horizontales), oenochoés (cruches à embouchure trilobée), lécythes (grands vases à parfum).

Comme son grand contemporain et peut-être rival Épictétos II (plus connu sous le nom conventionnel de Peintre de Cléophradès), le Peintre de Berlin a parfois utilisé la vieille technique de la figure noire pour décorer des amphores panathénaïques, que l’on offrait comme prix aux vainqueurs des épreuves sportives des fêtes athéniennes des Panathénées et qui, probablement pour des raisons de conservatisme religieux, ont continué à travers les siècles à être peintes selon l’ancienne manière, avec toujours les mêmes sujets: d’un côté la déesse Athéna, de l’autre une scène d’athlétisme. Sur les amphores pananthénaïques du Peintre de Berlin, une douzaine connues à ce jour dont certaines fragmentaires, les athlètes du revers sont sveltes et se déplacent avec une liberté de mouvement qui dénote un style de dessin déjà assez évolué. C’est que, paradoxalement, ces amphores à figures noires sont relativement tardives dans la production du peintre.

Mais c’est en figures rouges qu’il a réalisé l’essentiel de son œuvre, et quelques-uns des chefs-d’œuvre de la peinture grecque sur vases. Probablement élève de Phintias et d’Euthymidès, le Peintre de Berlin semble avoir commencé sa longue carrière de peintre à figures rouges dans les dernières années du \BERLIN (PEINTRE DE) VIe siècle en décorant de petits vases (ainsi une coupe trouvée et conservée à l’Agora d’Athènes, inv. P 24113, signée par le potier Gorgos). Mais très vite il s’est cantonné à des céramiques de grande taille; ce goût pour les formes amples correspond à un sens de la majesté qui transparaît à la fois dans le choix des thèmes et dans le style et l’organisation du dessin de ses plus beaux vases. Dans le domaine des scènes de genre, que ne dédaigne pas le Peintre de Berlin, les sujets traités n’ont rien d’original: groupes dionysiaques, athlètes, guerriers, musiciens. Dans le répertoire des thèmes d’inspiration mythologique ou épique, il choisit volontiers les dieux olympiens, soit seuls — et quelquefois dans des situations originales —, soit en groupe, comme sur le dinos de la collection Ludwig en dépôt à l’Antikenmuseum de Bâle, où se côtoient Zeus, Athéna, Hermès, Apollon, Poséidon, Dionysos, accompagnés de Niké — la Victoire personnifiée —, qui lui est une figure particulièrement chère; parmi les héros de la légende, il représente, entre autres, Héraklès (ainsi, sur le stamnos G 192 du Louvre, dans un épisode de sa prime enfance, étouffant de ses mains les deux serpents monstrueux qui s’apprêtaient à le dévorer), Achille (qui combat en duel d’un côté avec Hector, de l’autre avec Memnon, sur le col du cratère à volutes E 468 du British Museum de Londres), Ménélas et Hélène, Égisthe, Triptolème, Ganymède (poursuivi par Zeus, comme sur le cratère G 175 du Louvre) ou encore Pélée en train d’enlever Thétis.

Bien qu’il sache à l’occasion composer une scène animée dans laquelle s’affrontent d’assez nombreux personnages (ainsi sur une amphore de l’Antikenmuseum de Bâle représentant Héraklès aux prises avec les Amazones), le Peintre de Berlin préfère peindre des figures isolées qu’il campe sur chaque face du vase, en réduisant au minimum les éléments secondaires du décor, et même en les supprimant complètement (comme sur l’amphore 56.171.38 du Metropolitan Museum de New York, ornée d’un côté d’un citharède, de l’autre d’un arbitre d’épreuve sportive). Les figures se détachent alors d’une façon extraordinairement sculpturale sur le fond du vase entièrement noir. Et comme l’expression des visages est en général sereine et l’attitude pleine de retenue, même si le personnage est en mouvement, on a là l’expression la plus parfaite, dans le domaine de la peinture, de ce que l’on appelle le «style sévère» à propos de la sculpture contemporaine ou légèrement postérieure. Le Peintre de Berlin n’est pas à proprement parler l’inventeur de ce type de disposition des personnages, qui se rencontre sur des vases à figures rouges, mais d’une façon exceptionnelle, dès le dernier quart du \BERLIN (PEINTRE DE) VIe siècle, par exemple chez Oltos, mais il est le premier à en faire un véritable système de décoration, au point qu’il lui arrive plusieurs fois de dissocier, en les plaçant chacun sur une face du vase, deux personnages pourtant impliqués dans la même action (ainsi Zeus poursuivant Ganymède sur le cratère du Louvre G 175). Chez le Peintre de Cléophradès, la vérité tire vite vers la grandeur farouche. Chez le Peintre de Berlin, les figures sont plus élancées, les gestes plus gracieux, les visages plus pleins. Par la façon de disposer le corps, en particulier le visage, et d’orienter le regard, il sait donner à ses personnages une expression rêveuse, mais en même temps quelque peu tendue, qui apparaît comme le reflet d’un grand rayonnement intérieur.

La technique est, comme celle de beaucoup de peintres de l’époque, impeccable. Selon une manière qui rappelle Épictétos, les traits sont à la fois fins et fermes, avec, dans les meilleures œuvres, une grande sobriété de moyens d’expression, ce qui n’exclut pas le plein usage de certaines des ressources offertes par la figure rouge, en particulier l’emploi du vernis dilué pour obtenir des tons brun jaune et rendre ainsi, par exemple, la blonde chevelure du Phrygien Ganymède, sur le cratère du Louvre déjà cité. Malheureusement, ni cette qualité technique ni surtout la spiritualité ne se retrouvent dans les œuvres tardives du Peintre de Berlin, entre environ \BERLIN (PEINTRE DE) 475 et \BERLIN (PEINTRE DE) 460; seule subsiste une habileté assez froide, qui devient progressivement répétition mécanique. Peut-être le Peintre de Berlin subit-il l’influence d’un maniériste des années \BERLIN (PEINTRE DE) 470-\BERLIN (PEINTRE DE) 460 comme le Peintre de Pan (ainsi nommé d’après le sujet d’une des faces d’un cratère de Boston, Museum of Fine Arts, no 10.185), mais l’inspiration créatrice jaillit désormais chez d’autres peintres qui ont été, semble-t-il, ses élèves: Hermonax, le Peintre de Providence et, un peu plus tard, le Peintre d’Achille.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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